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Une sélection commentée de livres jeunesse s'intéressant aux relations humain/animal.

 

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12 février 2015 4 12 /02 /février /2015 20:56
Rue des petits singes

Écrit par Agnès Laroche

aux éditions Rageot (romans - mystère), 2013

Prix : 6, 45 euros

A partir de 8 ans

Lucie adore Maminou, sa grand-mère, mais elle s'inquiète pour elle : ne serait-elle pas en train de perdre un peu la tête ? Pour en avoir le cœur net, elle obtient de ses parents l'autorisation de passer un week-end entier chez elle. Hélas, ses soupçons se confirment. Maminou prétend avoir vu un singe se promener dans la rue. Pourtant, c'est bien la vérité, comme le prouvent les photos que Maminou a pensé à prendre. Décidée à éclaircir ce mystère , Lucie se lance sur la piste du petit animal. Elle la conduit dans les locaux d'une ancienne clinique abandonnée. C'est de là que le capucin s'est échappé. Mais d'autres singes y sont encore, enfermés dans des cages. Heureusement, le nouveau voisin a plus d'un tour dans son sac. Lui aussi s'est aperçu du trafic dont les animaux sont victimes. Il apporte son aide à Lucie et Maminou pour le démanteler et rendre aux singes des conditions de vie décentes.

Ce petit roman sympathique se lit facilement. Quelle petite fille ne rêverait d'avoir, comme Lucie, une grand-mère aussi drôle, tendre et aventureuse que cette Maminou ? Leur douce complicité donne le ton à cette histoire optimiste. Le voisin « d'un certain âge » intervient fort opportunément dans le dénouement et le capucin est tout à fait émouvant, parfait ambassadeur d'un phénomène méconnu et pourtant extrêmement préoccupant : le trafic d'animaux. L'auteur attire notre attention sur son ampleur grâce à l'implication de Lucie :

« La semaine suivante, j'ai fait un exposé sur le trafic d'animaux exotiques, le troisième plus important au monde après les armes et la drogue. La classe a adoré, la maîtresse aussi. A la récré, elle est venue me demander si j'accepterais de créer un blog d'informations sur le sujet. Avec les volontaires, on l'alimenterait le vendredi, à la place de l'atelier bricolage. J'ai dit oui tout de suite. Déjà, j'ai horreur du bricolage, mais surtout, j'étais fière de pouvoir aider, à ma façon, les animaux en danger. »

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16 janvier 2015 5 16 /01 /janvier /2015 20:28

couv Lola lion

Écrit par Isabel Abedi

Traduit de l'allemand par Florence Quillet

Illustré par Isabelle Maroger

Aux éditions Bayard jeunesse

(Estampillette), 2012

Prix : 12,90 euros

A partir de 9 ans

 

 

Pas de chance pour Lola : Blanche Neige, la petite chatte noire qu'elle a adopté, refuse de se laisser approcher. Toutes les astuces déployées avec ses amis n'y changent rien. Un jour, la petite sauvageonne disparaît. Lola finit par la retrouver confortablement installée chez sa voisine, Mme Balucheau, une vieille dame originale et sympathique. Mais un autre animal entre dans sa vie : une petite chèvre appartenant à un cirque, attachée à un piquet, bêle tristement. Lola rend de multiples visites à Perce-Neige, et décide de la libérer. Mais comment trouver un lieu convenable pour l'accueillir ? Ni son domicile, ni l'enclos des chèvres de l'école ne conviennent. Mme Balucheau lui a bien parlé d'un refuge qu'elle avait eu envie de créer il y a longtemps avec une amie perdue de vue : le Bercail. Et si le Bercail existait vraiment ? Et si cette amie pouvait être retrouvée ? Mais quelles circonstances dramatiques ont pu les séparer ?

 

Qui ne souhaiterait avoir une amie comme Lola ? Sincère, courageuse et déterminée, elle a un talent certain pour réunir autour d'elle toutes les bonnes volontés, à l'école comme dans sa famille. Avec un tendre papa brésilien, un petit ami français, une tante âgée de trois ans, aucun risque de s'ennuyer. Lola cœur de lion mérite bien son surnom ! Les animaux eux aussi y ont toute leur place. Tous les animaux. Car pourquoi vouloir choyer un petit chat et négliger une chevrette prisonnière d'un cirque ? Avoir des rêves ne l'empêche pas de réfléchir et de cultiver son esprit critique « Et là, j'ai compris que je ne voulais pas être dompteuse pour le cinéma, ni en vrai, ni en imagination, mais protectrice des animaux... Fermant les yeux, j'ai créé une immense réserve animalière, avec des montagnes, des prés, des forêts pour grimper aux arbres et des lacs pour se baigner. » Dommage qu'elle ne se pose pas de questions sur la provenance de ses crêpes au jambon, mais ça viendra peut-être, si un petit cochon rescapé de l'abattoir vient à sa rencontre au Bercail...

Une héroïne attachante, des personnages sympathiques, beaucoup d'humour et d'émotion, une série à recommander, sans hésitation.

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31 décembre 2014 3 31 /12 /décembre /2014 18:37

couv entre chiens

Écrit par Emmanuel Bourdier

Aux éditions Thierry Magnier

(petite poche), 2005

Prix : 5 euros

A partir de 9 ans

 

Le morne quotidien d'un chien dans un refuge : au jour le jour, l'attente, la lassitude, l'espoir... tel est le propos de ce court texte dans lequel l'auteur prête ses mots à Renaud, arrivé l'année des « R », depuis déjà trois ans. Les croquettes juste bonnes à apaiser sa faim, l'heure de la promenade, avec Roméo la brute ou Milou l'amical, le coin du box où il s'abrite à grand peine des intempéries lui semblent pourtant préférables à la misère de sa vie précédente, sous la menace des coups. Parfois, un copain d'infortune s'en va, remarqué par un humain au grand cœur qui lui offre enfin un foyer. D'autres sortent de leur cage en remuant la queue par habitude, avant d'être « éliminés ». Laquelle de ces deux options attend Renaud ? Milou pourrait bien avoir la réponse.

 

Le propre ce la collection « Petite poche » est d'offrir des textes de qualité à des lecteurs peu familiers des livres. Phrases courtes, structures grammaticales simples, alinéas aidant à saisir le sens du texte, telles sont les exigences imposées aux auteurs. Emmanuel Bourdier tire le meilleur parti de cet exercice de style pour faire naître l'émotion sans digression. L'essentiel est dit, tel que peut être interprété le ressenti de l'animal, avec une économie de langage laissant toute sa place à l'empathie. Ceux qui connaissent la vie des refuges y retrouveront sans doute un écho d'instants vécus, et les autres, qui hésitent encore, des motivations pour s'y rendre.

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2 novembre 2014 7 02 /11 /novembre /2014 19:15

couv Blue Earth

Écrit par Joseph Monninger  

Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Marie Hermet

Aux éditions Flammarion (Tribal), 2014

Prix : 12,50 euros

A partir de 12 ans

 

 

Speed est un vieux cheval qui toute sa vie a promené des enfants sur son dos et fait ce qu'on attendait de lui sans jamais se plaindre. Les Ferguson, chez qui il passent sa retraite, estiment que le moment est venu d'abréger sa vie. Mais la jeune Hattie, qui travaille chez eux, ne peut se résoudre à ce que cet animal, qu'elle aime plus que tout, meurt sans jamais avoir connu la liberté. Avec son amie Dolorès, elles décident de l'enlever et de partir avec lui vers l'Ouest, à Blue Earth, où s'ouvrent les grands espaces parcourus par les hordes sauvages.

C'est aussi pour les deux filles l'occasion de marquer une rupture avec leurs familles et de reconstruire avec elles des liens sur de nouvelles bases. Dans ce road trip mouvementé, elles s'offrent de moments de plaisir et de fantaisie, rencontrent des personnages authentiques et généreux, toujours guidées par la détermination de mener à bien leur projet. Leur sollicitude pour le vieux cheval les plonge plus d'une fois dans le doute et l'inquiétude, puis dans le soulagement et l'espoir. Mais la chance est avec elles et deux fringants cow-boys providentiels permettront à Speed de profiter du merveilleux cadeau que Hattie a mis tant d'énergie à lui offrir.

 

La lecture de ce très beau roman nous transporte avec autant d'enthousiasme et d'émotions que ses deux jeunes héroïnes en connaissent tout au long de cette aventure initiatique. Leurs caractères bien trempés et parfaitement complémentaires s'accordent dans une amitié qui sonne juste et leur donne la force de franchir tous les obstacles.

La question cruciale de la valeur de la vie est posée et reposée à maintes reprises par le sauvetage clandestin de Speed. La réponse tient sans doute dans la relation exceptionnelle entre Hattie et le cheval, si parfaitement décrite qu'il est impossible de ne pas partager leur bonheur d'être ensemble : « J'ai passé mes bras autour de son cou. Quand il a posé la tête sur mon épaule, le bout de son nez m'a caressé le dos. Il arrive qu'un cheval se laisse serrer dans les bras, mais avant Speed, je n'en avais jamais vu un seul qui sache rendre les caresses. Il me retenait tout près avec sa tête, et je suis restée un moment tout contre lui, pour lui expliquer à voix basse ce que nous allions faire. Je lui ai dit que je l'aimais, aussi, et il me serrait très fort comme s'il m'écoutait vraiment. Comme s'il comprenait. » Par contraste avec la beauté de cette complicité, l'épisode de la virée au « SPAM » et celui de l'arrêt au Piglets soulignent, en revanche, cruellement le peu de considération accordée à d'autres animaux. Le cochon, affectueux et astucieux, broyé dans l'impitoyable machine de la consommation de masse, mérite-t-il moins de sympathie que le mythique et romantique cheval ?

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24 août 2014 7 24 /08 /août /2014 15:11

couv vét au refuge

Ecrit par Anne-Marie Desplat-Duc

Illustré par Marc Mosnier      

Aux éditions Rageot, 2009

Prix : 5,20 euros        

A partir de 9 ans

 

Caroline veut que son frère l'accompagne au cirque qui vient de s'installer près de chez eux, mais elle doit insister, car Tanguy s'indigne que des animaux y soient donnés en spectacle. Pourtant, en visitant avec lui la ménagerie, elle est choquée par leurs conditions de vie et le persuade de tout entreprendre pour sauver un lion détenu dans une cage étroite. Heureusement, la mère de leur amie Olympe est vétérinaire. De bon conseil pour leur expliquer les longues démarches à entreprendre, elle accepte de leur apporter son aide active.  Cette initiative généreuse déclenche un élan de solidarité dans la classe des enfants, confortés par des professeurs appréciant leur intérêt et leur implication. Il faudra le soutien du directeur d'un refuge bien connu et d'une association dévouée à la cause des animaux sauvages pour que Brutus le lion puisse enfin goûter aux joies de la liberté.

 

Christian Huchedé, directeur du refuge de l'Arche, en Mayenne, sert d'inspirateur à cette histoire qui dénonce la présence d'animaux sauvages dans les cirques. Nombre d'entre, en effet sont venus grossir le nombre de ses pensionnaires parmi d'autres, victimes de maltraitance, de négligence ou d'ignorance humaines.

L'auteur s'attache à tempérer l'élan de sympathie et l'impatience des enfants en leur faisant prendre conscience des difficultés qu'il y a à agir en respectant des procédures, sans pour autant se décourager ni renoncer à ce qui a déclenché leur envie de se mobiliser. Elle les entoure d'adultes bienveillants et compétents, qui crédibilisent leur action. Elle permet cependant à toutes les voix de s'exprimer sur le sujet qui les préoccupe, y compris celle de camarades moqueurs et récalcitrants, et celle des propriétaires du lion à qui on enlève leur « gagne-pain ».

Elle fait aussi l'éloge des arts du cirque qui font preuve d'originalité et d'imagination, sans avoir besoin d'utiliser des animaux captifs pour attirer un un public conquis par des numéros montrant les incroyables prouesses d'artistes humains.

Ce texte facile à lire fait la part belle à l'émotion et suscite l'empathie pour ceux qui font les frais du spectacle. Un livre à mettre entre toutes les mains qui ne sont pas prêtes à applaudir n'importe quoi.

Plus d'infos sur le refuge de l'Arche qui fête en 2014 ses quarante ans, ici :

http://www.refuge-arche.org/

 

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18 mars 2014 2 18 /03 /mars /2014 20:36

couv chat yeux d'or

Écrit par Silvana de Mari

Traduit de l'italien par Jean-Luc Defromont

Aux éditions Bayard jeunesse, 2013

Collection Millezime

Prix : 12,90 euros

A partir de 10 ans

 

 

Affublée d'un prénom de princesse inter-galactique, de kilos superflus et de vêtements d'occasion, Leila a beaucoup de mal à trouver sa place au collège où elle vient de faire sa rentrée. Dans son ancienne école, tous les enfants étaient d'origine étrangère, et aussi pauvres qu'elle, élevée par une mère qui se tue à la tâche pour l'élever seule. Mais un jour, son regard croise celui d'un chat noir famélique encore plus misérable qu'elle. Leila décide de le secourir. Sa vie en sera complètement transformée. Les moqueries cessent, elle trouve des amis parmi les autres élèves, et recueille une drôle de petite chienne perdue par un vétérinaire qui s'y était beaucoup attaché. Elle continue de rendre visite à Myriam, son ancienne camarade de classe, d'origine éthiopienne, pour partager l'instruction qu'elle reçoit et dont la jeune fille est privée. Le chat noir veille sur Leila, présence bienveillante mais qu'elle seule semble percevoir. S'il vient en aide aux persécutés, comme elle ou des enfants juifs pendant la deuxième guerre mondiale , c'est qu'il fut victime d'une époque où de nombreuses jeunes femmes innocentes accusées de sorcellerie périrent suppliciées. Il répare les destins brisés comme celui de Myriam, organise des rencontres providentielles comme celle du vétérinaire et de Leila puis, lorsqu'il a joué son rôle, disparaît.

 

On doit reconnaître à Silvana de Mari un talent affirmé pour introduire avec humour et subtilité des sujets graves, parfois même tragiques, comme la mutilation sexuelle que subit la toute jeune Myriam. Elle se plaît à construire des personnages dont les bons côtés finissent par se révéler sous des abords antipathiques, à découvrir le meilleur de chacun, même dans la violence que les déshérités ont pour seul repère. Cette démarche altruiste et positive n'est sans doute pas étrangère à l'attention qu'elle accorde aux animaux. Leila affronte avec courage la misère, qu'elle sait reconnaître et s'efforce de soulager : celle de son amie éthiopienne, celle d'un chat affamé, celle d'un chiot perdu. En retour, l'amour et la reconnaissance des animaux adoucissent sa vie et celle de ses amis. Fabuleuse, la petite chienne qui porte bien son nom, est la seule à ne pas se laisser duper par l'agressivité avec laquelle Myriam tente de cacher sa détresse. Et ce n'est pas la distinction de sa race qui fait sa valeur aux yeux de Leila, car elle pense que personne ne viendra réclamer ce drôle de bâtard au corps trapu et aux oreilles démesurées (en fait, un pur basset hound). Alors, même si on sent venir le loin la fin prévisible de ce roman et l'arrivée d'un nouveau « papa » dans la vie de la petite fille, on s'attache avant tout à la générosité candide qui donne toute sa force à sa jeune héroïne. Elle rappellera sans doute aux lecteurs de Silvana de Mari le protagoniste essentiel d' autre de ses livres, l'excellent Dernier Elfe.

 

 

 

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18 février 2014 2 18 /02 /février /2014 20:44

couv jour des poules

Ecrit par Florence Thinard

Aux éditions Thierry Magnier, 2013

Collection En voiture Simone

Prix : 6,90 euros

A partir de 9 ans

 

Lassée de la malbouffe et indignée par les conditions de vie des poules en batterie, Maryse, une mère de famille, décide d'installer son poulailler à domicile et de profiter des œufs « faits maison » qui en sortiront. Avec une détermination sans faille, elle entraîne dans l'aventure mari et enfants, les impliquant dans l'achat des animaux et la construction de leur domaine. Prêts à toutes les audaces et passés maîtres dans l'art du bricolage, ils concrétiseront leur projet. Mais, faute de connaissances dans cette nouvelle entreprise, ils apprendront à leurs dépends que poules et poussins ne sont pas de tout repos, ravagent le jardin et menacent la tranquillité du voisinage.

 

Un certain Poulet fermier, précédemment cité dans ces pages, ayant récemment prêté sa plume à Agnès Desarthe, c'est au tour de Florence Thinard de nous initier à l'art volailler. Elle le fait avec un humour ébouriffant, se moquant gentiment de l'enthousiasme débordant, et néanmoins redoutable, dont peuvent faire preuve certaines personnes d'excellente volonté, comme la Maryse de cette histoire. On rit beaucoup et on comprend que l'auteur est devenue experte en la matière par la pratique, lors d'épisodes comme le nourrissage des poussins, le sauvetage des fleurs ou les démêlés entre poules belligérantes. Cette expérience éthologique pourrait faire douter de la sympathie inspirée spontanément par de charmants poussins qui s'affirment en grandissant comme des oiseaux au tempérament bien trempé. Mais l'intention de Maryse, heureusement couronnée de succès, est louable, puisqu'elle cherche, tout en nourrissant sa famille, à leur offrir de meilleures conditions de vie qu'à leurs congénères produits par l'industrie agro-alimentaire. Si l'un d'eux devient coq, c'est qu'il n'a pas été trié et éliminé tout petit par broyage ou étouffement comme le veut une filière qui ne conserve que des femelles pondeuses, et on est bien content pour lui ! Encore plus content quand, loin de vouloir le passer à la casserole, la famille l'amène à la campagne couler des jours heureux. C'est que, selon Maryse : « On ne donne pas de nom aux animaux d'élevage. Sinon ce sera plus dur quand il faudra les... les... ». On devine la suite. Et on peut raisonnablement imaginer l'issue que pourrait prendre l'initiative suivante : « Un animal intelligent, familier, qui produit cent kilos de bonne viande en se nourrissant de détritus... Un cochon ! » Ce que c'est que de sortir les animaux de leurs emballages...

 

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22 décembre 2013 7 22 /12 /décembre /2013 17:00

couv poulet fermier

Ecrit par Agnès Desarthe

Illustré par Anaïs Vaugelade

Aux éditions L'école des loisirs (Mouche), 2013

Prix : 8,50 euros

A partir de 8 ans

 

Fils de fermier, Douglas Dumordu a toujours été plus doué pour les études que pour le travail de la terre. Aussi à la mort de son père, le jeune homme décidé malgré tout à prendre sa succession, fait-il tout de travers, malgré sa bonne volonté. Son entourage s'en inquiète, et particulièrement son voisin, car Miranda, sa fille, et Douglas ont décidé de se marier. Miranda intervient alors pour sortir son fiancé de ce mauvais pas. Elle lui conseille de se lancer dans le « Poulet fermier ». Douglas s'empresse de suivre son conseil... à sa façon, bien sûr. Bientôt tout le village est en émoi à cause d'un certain Ernest. Lequel pourtant, par l'efficacité de son travail, rend à la ferme sa prospérité. Mais qui est Ernest ? Le poulet « fermier », bien sûr !

 

Avec cette réjouissante fantaisie littéraire, Agnès Desarthe s'amuse à prendre au pied de la lettre l'expression manifestement galvaudée de « poulet fermier », qui n'est plus dans ce texte une volaille élevée à la ferme, mais un oiseau capable de prendre en charge tous les travaux qui incombent d'ordinaire au paysan. Ce tour de passe-passe sémantique est possible grâce à la touchante naïveté de Douglas, jeune homme qui découvre, sous son regard candide, un univers familier pour son entourage, mais de lui inconnu. On rit de ses maladresses, mais Miranda est la première à lui reconnaître des qualités rares. Avec une désarmante sincérité, il démontre à ses voisins que leurs rapports avec leurs animaux prouvent qu'ils leur reconnaissent une réelle sensibilité : ne leur arrive-t-il pas de leur adresser la parole, parfois même avec des mots gentils ?

Enfin Ernest, le poulet « surdoué », réussit un dernier exploit en réunissant les deux tourtereaux. Ensemble, ils cultiveront un secret en même temps que leur terre. Leurs poulets de ferme y trouveront largement leur compte. Car au grand soulagement d'Ernest et de ses congénères, Douglas n'aime que les tartines. C'est sans doute pour cela que sa vache, croquée avec espièglerie par Anaïs Vaugelade, ne rit pas bêtement, mais adresse au lecteur un dernier clin d’œil complice.

 

 

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9 septembre 2013 1 09 /09 /septembre /2013 19:17

 

couv calpurniaEcrit par Jacqueline Kelly

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Diane Ménard

Aux éditions L’Ecole des loisirs, collection médium, 2013

Prix : 19 euros

A partir de 12 ans

 

 

Le XIXe siècle va bientôt s’achever, dans cette ferme du Texas où vit Calpurnia , entourée de ses six frères. Elle est donc la seule fille, et sa mère entend bien lui donner l’éducation qui fera d’elle un parfaite femme d’intérieur, selon le modèle qui sied à la bonne société de l’époque. Mais Calpurnia, âgée de « presque douze ans »,  a d’autres aspirations, et plutôt que de rester sagement à la maison, consacre tout son temps libre à l’observation de la nature et ne connaît pas de plus grand bonheur que se baigner dans l’eau de sa chère rivière où foisonne la vie. Guidée par sa soif de curiosité, elle se rapproche de son grand-père et parvient à découvrir, sous ses aspects bourrus, des trésors de tendresse et de bienveillance. Elle reçoit de lui un présent inestimable, le livre de Darwin : De l’origine des espèces et apprend à cultiver son esprit scientifique. Mais sa mère n’abandonne pas les projets qu’elle a pour elle et la harcèle avec les cours de piano, de broderie ou encore de cuisine, disciplines dans lesquelles elle est censée exceller. Cependant, tandis que passent les saisons dans une chaleureuse ambiance familiale, Calpurnia confirme ses dons et son caractère hors normes.

Par sa drôlerie et sa naïveté, la jeune héroïne entraîne le lecteur dans le tourbillon de son esprit en éveil. Elle exerce sa curiosité aussi bien sur la nature que sur elle-même et sur son entourage. Ses remarques peuvent prêter à sourire, mais  elles sont bien plus profondes qu’il n’y paraît de prime abord. Le personnage du grand-père, considéré un vieil original que tout le monde respecte, vient ajouter du crédit à son questionnement critique. Celui-ci ne se porte pas seulement sur  l’injustice de la condition féminine, mais aborde aussi l’absurdité de la guerre et l’ignominie de l’esclavage. En faisant de Darwin le maître à penser de Calpurnia, l’auteur s’intéresse à l’évolution dans un sens global.

Evidemment, les rapports que les humains entretiennent avec les animaux en sont un élément moteur. Avec Darwin, l’Homme n’est plus la finalité ultime de la création divine, et le monde se trouve bouleversé. Précurseur d’un nouvel intérêt porté sur le monde animal, il inaugure une série de remises en cause qui se dessinent sous les interrogations de Calpurnia. Difficile de ne voir dans un animal dont on s’est occupé qu’un simple sujet d’étude sans se soucier de son bien être et de rester indifférent à son ressenti individuel quand on lui a donné un nom, comme le raconte l’expérience de Petey, le papillon de nuit. Impossible de ne pas comprendre l’attachement  de Travis, ce jeune frère au cœur tendre, pour les dindes destinées au repas de Thanskgiving qu’on lui a demandé de nourrir, lui qui voudrait recevoir en cadeau pour Noël un âne, animal de ferme qui ne se mange pas. Tandis que de nouvelles découvertes, comme l’automobile ou le téléphone, révolutionnent les façons de vivre, le monde de Calpurnia se prépare à de grands changements, à l’aube d’un avenir aussi étonnant et prometteur que la couverture de neige qu’elle admire pour la première fois à son réveil, le premier jour de l’an 1900.

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16 août 2013 5 16 /08 /août /2013 20:15

 

couv mahoutÉcrit par patrice Favaro

Aux éditions Thierry Magnier, 2010

Prix : 10,50 euros

A partir de 10 ans

 

Comment Sid s'est-il retrouvé sur les rives de la Kivari avec pour seule compagnie son éléphant Gajendra ? Avant que badauds et curieux ne s'attroupent autour de celui qu'ils considèrent désormais comme un saint, la vie avait commencé durement pour cet enfant muet, vendu par son père couvert de dettes, à un individu sans scrupules. Plongé au cœur d'une terrible réalité mêlant misères des hommes et des bêtes par son apprentissage de mahout chez Ashraf, le sinistre loueur d'éléphants, il s'enfuit après un accident survenu lors du tournage d'un film, où un animal, rendu fou par l'agitation et les mauvais traitements, cause un grave accident. L'intervention du jeune Lakshmana, compagnon d'infortune, l'avait tiré des griffes de Vigai, le dangereux complice d'Ashraf. C'est encore avec son aide qu'il réussit à reprendre contact avec le professeur Paresh, responsable de la fondation Elephant Wildlife Rescue, dont il n'a pas oublié l'intervention contre les méfaits de son ancien employeur.

Cette rencontre marque un tournant dans sa vie : accueilli dans l' équipe du professeur, il apprend à mieux connaître les éléphants auprès d'Ashoka, un mahout sage et expérimenté. Il noue alors des liens de confiance avec Gajendra, rescapé d'un sauvetage après une confrontation entre paysans et éléphants se disputant les mêmes territoires de survie. Et enfin, soutenu par son amitié avec Pryia, la fille du professeur, il parvient à se remettre du traumatisme qui, enfant, l'avait privé de l'usage de la parole. Il est alors prêt à poursuivre l’œuvre de son père auprès des animaux et des hommes qui veillent sur eux.

 

Construit selon le motif des eaux de la Kivari qui se rejoignent après avoir longtemps été séparées en deux bras distincts, le récit de la vie de Sid débute au moment où il a rendez-vous avec son avenir. Porté par cette dynamique narrative, le lecteur ne pourra échapper à l'envie de connaître les événements qui se sont succédés jusqu'à cet instant. L'alternance entre passé et présent est d'ailleurs marquée dans le texte par des changements de typographie, qui en soulignent les effets. Ce n'est pas par choix que Sid est devenu mahout : des milliers d'enfants ont connu un sort similaire dans l'Histoire indienne. Mais il y a un espoir pour lui d'échapper à la fatalité de la misère et d'accéder, comme les éléphants prisonniers des hommes, à une vie moins contrainte.

Derrière l'image festive et colorée des parades qui séduisent le touriste, Sid parcourt l'envers du décor : les hommes s'acharnant sur leurs bêtes sous l'emprise de l'alcool, l'appât du gain primant sur le respect de la vie, les accidents dont sont victimes les mahouts ou les paysans empiétant sur les terres ancestrales des éléphants, les pièges qu'ils leurs tendent, les « kralls », cages étroites où ils les enferment après leur capture... Mais certains hommes, représentés par les figures du professeur Paresh, de sa fille, ou du sage Ashoka, contribuent, autant qu'il est en leur pouvoir, à apaiser le cours du destin en éveillant les consciences. Lorsqu'Ashoka parle de son éléphant, c'est pour dire : « Les éléphants ont une mémoire sans faille. C'est dans un kraal comme celui-ci qu'il a passé des semaines avant d'accepter enfin sa captivité. Un très mauvais souvenir pour lui. J'ai consacré tout ma vie à mon métier de mahout, mais je peux te dire une chose à présent, Sid : la seule façon de les aimer, c'est de les laisser vivre en liberté. »

Une lecture marquante, à poursuivre par la visite du blog de l'auteur :

http://mots-nomades.hautetfort.com/

 

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